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Pendant qu’Optic 2000 s’enfonce…

Il y a quelques temps, j’avais commenté la dernière campagne d’Optic 2000, intitulée « Une nouvelle vision de la vie », mettant en scène le controversé Yann Arthus Bertrand. Cette campagne, décriée par à peu près tous mes confrères, me semblait plus maladroite dans son ingénierie que dans ses intentions. Le spot souffrait certes d’un trop plein de messages, doublé d’un manque de cohérence, mais je n’y voyais pas pour autant de greenwashing. A mon sens, c’était surtout mal fichu.

Il fallait sérieusement redresser la barre avec le nouveau spot dans lequel Maud Fontenoy succède au photographe du Club Med, ce qu’Optic 2000 n’est pas vraiment parvenu à accomplir.

Le message est le suivant : Optic 2000 protège vos yeux comme Maud protège les océans. Dans l’univers de la communication, on appelle cela une passerelle mentale. Il faut reconnaître que les stagiaires de l’agence ont dû sacrément se creuser les méninges pour nous pondre un truc pareil et le vendre à Optic 2000.  Alors que le précédent spot envoyait du vert de partout, ils est à présent plus discret, puisque nous sommes dans le grand bleu. Optic 2000, à défaut d’innover dans l’éthique, nous invente le blue-washing. Saluons l’effort.

Autant le spot précédent affichait dans une grande confusion des engagements divers en faveur de la fondation GoodPlanet, du Téléthon et du made in France, autant nous n’avons plus ici que le soutien à la fondation Maud Fontenoy, soit plus grand chose.

J’avais refusé l’acharnement sur Optic 2000 et mis en garde contre le cri un peu trop systématique au greenwashing, mais force est de constater qu’il n’y a plus grand chose à porter au crédit de l’ancien opticien de Johnny, et je ne peux qu’être en accord avec l’analyse de Mathieu Jahnich du Sircome, qui a déjà dit ce qu’il y avait à en dire.

…Atol aussi veut sa campagne éthique !

Bien décidés à ne pas se laisser faire, les opticiens Atol n’ont pas tardé à lancer la riposte, à travers leur campagne « Atol, créateur citoyen ». Il faut croire que le créneau « éthique » est jugé porteur par les fabricants de lunettes. 

La campagne du concurrent étant à côté de la plaque, Atol disposait d’un boulevard pour réussir la sienne et marquer les esprit. Encore eût-il fallu avoir quelque chose à vendre… Faute de mieux, on reste sur le thème du made in France.

Le clip d’Atol est une déclaration d’amour à « la valeur crée, le savoir faire et l’envie de travail bien fait » de ses ouvrières « qui ici, en France, ont participé à ce qu’est Atol aujourd’hui ». Débordant de gratitude, Atol leur adresse « un grand merci ».  La drague un peu lourde, on insiste : « Vous êtes belles, Atol vous aime ». On frôle l’indécence.

Pour enfoncer le clou, Mat Pokora, nouvelle égérie d’Atol et chanteur de boys band semi-débile, martèle en fond sonore dans un français approximatif « non c’est pas les hommes qui mènent le monde ». Tout est résumé dans le titre de son tube, aussi sobre qu’élégant : « Merci d’être ».

Tu l’as dit, Mat ! Okay, Okay, tout ça, voilà !

Mais revenons à notre « créateur citoyen » (expression aussi creuse que la « nouvelle vision de la vie  » d’Optic 2000). Pour mettre à l’honneur la beauté de ses employées chéries, Atol offre à trois d’entre elles une fugace demi-seconde de son spot, en gris sur fond gris, avec un petit effet de flou.

Désolé mesdames, la vraie star du clip, c’est Adriana Karembeu, en couleurs vives et pleine lumière. Mais quoi de mieux pour représenter l’ouvrière de la lunetterie jurassienne que la bouche ouverte d’un mannequin slovaque ?

adriana

Tout le professionnalisme, le savoir-faire, toute la gravité digne de l’ouvrière jurassienne

Atol se fout du monde, et de ses employées en premier lieu ! Tant de flagornerie pour au final se faire voler la vedette par un mannequin de l’Est dans une publicité sur le thème de la relocalisation, vous en savourerez sans doute toute l’ironie mesdames !

Comprenez, c’est qu’il en faut une bonne tartine de glamour, pour vendre des lunettes en plastic à clips fabriquées dans le Jura, Il faut au moins Paris by night. « capitale de la mode ». Plus c’est gros, plus ça passe…

Dans les faits, Atol ne brille pas non plus

Combien sont-elles, nos ouvrières (et ouvriers) jurassiennes ? D’après Atol, 500, ce qui est significativement moins bien que les 600 emplois en France d’Optic 2000 (d’après leurs déclarations respectives…). Après on peut s’amuser à calculer des rapports entre les volumes produits en France et ceux produits à l’étranger pour les deux opticiens, pour être plus juste qu’avec des valeurs absolues, mais nous n’avons pas les données et quoi qu’il en soit, 500 ou 600 emplois, dans les deux cas, ce n’est pas folichon.

Quoiqu’il en soit, ici non plus, on ne se gêne pas pour afficher son petit autolabel garanti fait maison : « voir français, voir plus loin ».

Quand la Camif le fait, on le signale sans s’en offusquer parce que derrière c’est solide, mais quand ce n’est pas le cas, on est moins indulgent, c’est sûr.

Sur son site internet, on retrouve peu ou prou le même contenu que chez Optic 2000, si ce n’est une certification ISO 9001 pour la qualité et ISO 14001 pour l’environnement en plus. On n’est quand même pas peu fier d’annoncer que l’on fait le tri des déchets, et que l’on n’utilise pas de sac en plastic. Pas mal !

Tout cela manque cruellement de matière, on est vraiment dans le basique.

Hypocrisie et surpromesse

Entre une politique RSE au mieux faiblarde et une campagne hypocrite au dernier degré, Atol tient la dragée haute à Optic 2000, en plus roublard peut-être.

Même s’il criait un peu fort, Il était quand même sympa cet Antoine, avec ses chemises colorées et ses chansons rigolotes. Et il avait des panneaux photovoltaïques sur son voilier, notre vieux hippie ! De l’éolien et du solaire, il y avait peut-être quelque chose à creuser. En plus, il aimait les animaux…

2 réflexions sur “Atol contre Optic 2000, la guerre des cancres.

  1. Je ne l’avais pas vu cette campagne d’Atol… je crois que tout est dit, très belle analyse. C’est vraiment dommage car ce concept de branches clipsables est un avantage produit complètement dans l’air du temps qui aurait pu être beaucoup mieux mis en valeur.

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